Houilles : un retard d’investissement préoccupant face à la croissance urbaine

Depuis plusieurs années, Houilles fait face à un sous-investissement dans son patrimoine communal, malgré des besoins croissants et des engagements en faveur de la modernisation. Ce constat a été partagé par l’ensemble des forces politiques, y compris la majorité municipale en place depuis cinq ans.

Selon le rapport du budget primitif 2025 :

« L’objectif est de fournir les infrastructures nécessaires pour répondre aux nouveaux besoins de la population et au renouvellement du patrimoine existant. Le sous-investissement a ainsi été identifié comme pesant sur la ville, créant une ’’une dette de patrimoine’’ ». 

Face à un budget en baisse, à la vente de terrains et à une gestion en mutation, la municipalité rencontre des difficultés pour entretenir et renouveler ses équipements essentiels. Ces enjeux soulèvent la question de la capacité de la ville à répondre aux besoins futurs tout en maintenant la qualité de vie de ses habitants. 

Si la responsabilité de la gestion précédente est évoquée, celle de l’équipe actuelle est également engagée dans la recherche de solutions.

Le patrimoine communal : état et enjeux

Le patrimoine municipal comprend 115 sites (gymnases, écoles, bâtiments administratifs, logements, etc.) pour une surface bâtie de 84 000 m², ainsi que 85 000 m² de terrains non bâtis. Un audit réalisé en début de mandat a qualifié l’état général du patrimoine de « tolérable », mais avec des équipements dans un état « préoccupant » ou « critique ». Parmi eux, figurent notamment plusieurs écoles (Allende, Piaget, Schoelcher), la cuisine centrale, certains gymnases (Ostermeyer, Guimier I), des crèches, la Maison Schoelcher, l’église Saint-Nicolas, ainsi que divers logements et locaux associatifs.

Si quelques projets urgents ont été menés à bien, comme la rénovation de l’école Allende ou la crèche Charles-de-Gaulle (dite Les Choupissons), l’effort global reste insuffisant pour faire face à l’usure du patrimoine et aux besoins d’une ville en croissance démographique.

Les investissements réalisés

Entre 2014 et 2019, la municipalité a consacré en moyenne 11,1 millions d’euros par an aux dépenses d’équipement. 

Entre 2020 et 2024, cette moyenne est descendue à 8,9 millions d’euros par an. 

Sur cinq ans, cela représente environ 44,3 millions d’euros, un montant qui semble en décalage par rapport aux besoins. 

En effet, pour atteindre un bilan comparable à celui de la précédente majorité, il faudrait réaliser la majorité des projets votés en 2025 (soit 19,3 millions d’euros, auxquels s’ajoute un reste à réaliser de 5,9 millions d’euros pour 2024).

Ce retard est d’autant plus notable que les promesses de campagne de l’équipe municipale, évoquaient un objectif de plus de 73 millions d’euros de dépenses d’équipement sur le mandat.

Les causes possibles de ce retard

1. Un manque de foncier

La hausse des marchés fonciers et immobiliers ainsi que la lourdeur et la complexification des procédures d’aménagement obligent les collectivités et acteurs publics à anticiper la question du foncier et de sa maîtrise et ce, alors même que l’opération d’aménagement n’en est qu’au stade des études préalables.

La maîtrise du foncier s’avère être une condition sine qua non pour la mise en œuvre d’une opération d’aménagement.

Rappelons que le prix de vente du foncier médian au m² est de 5 146 € (data.gouv.fr). 

Dans le cas de la construction d’un gymnase tel que Ostermeyer possédant un terrain de 2 320 m², l’achat du foncier reviendrait à 11,9 M€. 

Or, depuis 2020, la municipalité privilégie la vente de terrains issus du patrimoine existant, avec des recettes estimées à 5,7 millions d’euros (3,2M€ effective et 2.5M€ prévisionnelle en 2025) contre seulement 500 000 euros d’acquisitions.

Cette stratégie foncière rendra de plus en plus en incertaines les prochaines grandes opérations d’investissement faute de foncier.

2. Un contexte national difficile

Comparées à d’autres villes de même strate (20 000 à 50 000 habitants), les dépenses pour les équipements de Houilles sont inférieures. 

Entre 2020 et 2023, elles s’élevaient à 287 euros par habitant, contre 355 euros pour des villes similaires. 

Ces collectivités ont su maintenir ou augmenter leurs investissements malgré le contexte national.

3. Une gestion des projets complexe

Depuis plusieurs années, la municipalité a connu un turnover important au sein de ses équipes, avec un taux de renouvellement d’environ 25 % sur trois ans. 

Ce phénomène a entraîné un manque de suivi des dossiers, une perte de connaissance historique et des retards dans la réalisation des projets. 

La succession de quatre Directeurs de Services Techniques, de trois Directeurs Généraux des Services (DGS) depuis 2020, ainsi que la vacance du poste de DGS depuis un an, illustre cette difficulté.

4. Un manque de ressources

Si le manque de personnel qualifié est une cause partielle du retard, le principal obstacle reste le financement. 

La capacité d’autofinancement, principalement issue des excédents du budget de fonctionnement, a diminué depuis 2022. Cela limite la disponibilité des fonds pour les investissements, malgré l’héritage d’une ville initialement en situation financière saine.

Ce phénomène de baisse n’est pas observé sur l’ensemble des villes de même strate. 

Il s’agit là d’un problème spécifique à Houilles, dont nous vous expliquerons les causes dans un prochain article. 

Les conséquences du retard d’investissement

Ce sous-investissement se traduit par une dégradation progressive des équipements : 

  • Dans le secteur scolaire, les investissements hors opérations ont chuté de 1 million d’euros par an (2014-2019) à moins de 600 000 euros (2020-2023), entrainant le report de la mise en accessibilité pour les personnes à mobilité réduite des établissements tels que les écoles Buisson-Bréjeat, Réveil Matin, Velter…
  • Dans le cadre d’opérations, de grands projets tels que la réhabilitation de la cuisine centrale ou de l’école Schoelcher, la création d’un pôle éducatif en lieu et place du centre de loisirs Jacques-Yves Cousteau, ont été oubliés ou retardés, malgré leur importance. 
  • Dans le domaine sportif, aucune nouvelle infrastructure majeure n’a été créée ou rénovée depuis 2020, à l’exception de réparations mineures ou du terrain synthétique Manuel Mangana pour un montant de 600 000 euros.
  • Dans le domaine culturel, la réhabilitation de la maison Schoelcher ou la création d’une salle polyvalente, restent à l’état de projets ou de discussions.

Les retards d’investissement, accentués par des choix stratégiques et des difficultés de gestion, sont une préoccupation majeure pour l’avenir de la ville. 

Si quelques projets nécessaires ont été réalisés, il faudra redoubler d’efforts lors du prochaine mandat, pour répondre aux besoins croissants et préserver la qualité de vie des Ovillois.

Houilles doit désormais envisager une stratégie d’accélération des investissements, une gestion plus efficace de ses projets, et une mobilisation renforcée de ses ressources, pour assurer un développement équilibré et durable.